les témoignages s'accumulent depuis la médiatisation du mal être des postier-e-s. La négociation lancée par l'entreprise avec les organisations syndicales le 26 octobre ouvre un chantier où la crédibilité de chacun sera engagée. Un échec n'est pas envisageable pour le bien des postier-e-s et de la Poste elle même.
Voici un extrait d'une dépêche AFP de ce jour. Qu'en dites vous? Vous reconnaissez vous dans ces témoignages?
"Il distribue toujours
le courrier mais
collecte aussi du papier à recycler, rend visite sur commande
aux personnes âgées, photographie les nids de poule : le facteur nouveau est
arrivé, au prix de contraintes horaires et réorganisations parfois
douloureuses.
Recy'go, Proxi vigie,
Cohésio, Bemobi... La diversité des prestations commerciales aux noms branchés
impressionne : collecte de papier ou de capsules de café usagées auprès d’entreprises
; surveillance de la voirie pour les communes, avec photos d'éventuelles dégradations
; collecte de données pour des organismes sociaux comme les complémentaires
santé.
Certains se sont même
reconvertis pour superviser l'examen du code de la route, ou en spécialistes du
"diagnostic rénovation énergétique" ou de "l'écomobilité"
pour apprendre à rouler plus écologiquement.
Pour Célia, 32 ans, en
CDI depuis six ans à la PPDC (plateforme de préparation et de distribution du
courrier de Rungis dans le Val-de-Marne), "pas de problème". Avec sa
camionnette jaune, cette jeune femme énergique distribue le courrier à vive
allure aux très nombreuses entreprises du secteur et y collecte en plus
"trois bacs par jour" de papier à recycler.
"C'est vrai que
les tournées sont plus longues qu'avant", commente Célia, qui travaille de
5H30 à 11H45 et concède que pour ses collègues à vélo "c'est sans doute
plus dur".
Marie (prénom changé),
la cinquantaine, vit difficilement les choses et s'étrangle quand il faut
distribuer "des catalogues aux personnes âgées avec obligation de revenir
chercher leur commande une semaine plus tard".
Elle pousse son chariot
électrique tous les jours à Paris, et doit écourter les conversations qui
faisaient le sel de son métier. Elle scrute son smartphone et l'application
permettant un suivi en temps réel de sa tournée.
Elle en est à
"31%", indique son téléphone, "c'est de la remise à la
minute", dit-elle. Depuis septembre elle travaille "une heure trente
de plus en moyenne" et doit aller chez le kiné pour des tendinites
chroniques.
Payée "1.500 euros
net après 20 ans d'ancienneté", elle réclame des heures supplémentaires.
Marie dénonce "des objectifs sans rapport avec la réalité et un service de
qualité" et se dit "harcelée" par une cheffe d'équipe l'accusant
de ne "pas aller assez vite".
- Baisse du courrier,
tournées à rallonge -
Le volume de courrier a
baissé de "30% entre 2008 et 2015", selon La Poste, et ces nouveaux
services visent à "préserver l'activité", explique à l'AFP
Jean-Michel Molette, directeur chargé de ces nouvelles prestations.
Si leur part dans le
chiffre d'affaires reste minime (40 millions sur 23 milliards d'euros), ces
services "se développent très fort", selon ce responsable, qui
prévoit un doublement en 2017. Avec 4 millions de prestations en 2016, cela
représente "une ou deux par semaine et par facteur" pour environ
70.000 qui travaillent dans toute la France six jours sur sept.
Mais le rythme des
baisses d'effectifs (3.000 à 5.000 par an depuis 2005) "fait qu'un facteur
aujourd'hui travaille plus qu'il y a dix ans", souligne Emmanuel Cottin
(CGT), dénonçant des "réorganisations permanentes et des conditions de
travail et de santé qui se dégradent".
La CFDT s'interrogeait
récemment sur un "fonctionnement" qui "hypothèque les exigences
de qualité que se fixe elle-même l'entreprise".
A la PPDC de Rungis,
qui compte 160 personnes, "ça ne change rien pour le temps de
travail" de 35 heures, six jours sur sept, 300 jours par an, insiste
Thierry Caraty, directeur. Il admet "des difficultés localement" mais
mise sur "l'intelligence managériale pour expliquer les changements".
Chef d'équipe en
Normandie, Pierre (prénom changé), la quarantaine, est pourtant "presque
toujours en tournée (jusqu'à 140 km/jour), rallongée de deux heures en moyenne
quotidiennement" pour remplacer les absents. Il remet désormais de la
"pub en main propre", une action qui s'accompagne d'un "texte à
énoncer". Il n'est "pas opposé" aux nouveaux services mais
"seulement s'ils répondent aux besoins des gens".
- 5 km/h, 6 mn par
personne -
A la plateforme
courrier de Fresnes (Val-de-Marne), Jean-Luc Horace, encadrant, acquiesce
lorsqu'on lui parle de "souffrance au travail". Sans cesse "à
l'écoute", il "explique pour motiver" ses troupes, mais
"c'est de l'endurance".
Parmi les nouvelles
offres que les factrices et facteurs assuraient gratuitement auparavant : la
visite aux personnes âgées ou vulnérables isolées, pour le compte des
municipalités et des mutuelles, que La Poste souhaite élargir aux particuliers.
38.000 facteurs sont
inscrits à la formation dont 12.000 sont en cours, selon La Poste.
Baptisée "Veiller
sur mes parents", cette nouvelle offre sera facturée de 55 à 135 euros
mensuellement pour deux, quatre ou six visites par semaine, un retour
d'information aux demandeurs qui auront aussi accès à "une assistance en
ligne en cas d'urgence".
Abraham, 28 ans,
facteur dans les Landes où il effectue déjà ce type de visites, trouve ça
"très bien". "Je leur pose des questions de santé et je note les
réponses sur mon téléphone", dit-il. Il "apprécie le contact avec les
clients" et le fait d'être "seul et libre" pendant sa tournée.
Mais pour Pierre,
"La Poste abuse de l'image du facteur proche des gens, alors qu'elle calcule
nos temps de tournée au plus juste avec un logiciel". En théorie, le
facteur devrait ainsi marcher à 5 km/h, remettre un recommandé en 1 minute 30
et ne passer que 6 minutes auprès d'une personne isolée.
Responsable des
ressources humaines à la branche courrier, Line Exbrayat se défend d'avoir
recours à tout logiciel ainsi qu'à la géolocalisation. Elle explique utiliser
"une méthode nationale de préquantification des tournées pour respecter un
parcours logique" et faire "des ajustements permanents", discutés
avec les facteurs. "Il peut y avoir des personnes en difficulté mais ce
n'est pas le standard", dit-elle."